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Perdita (De) Hermione

 

Ce tableau représente ma vision de la relation viscérale entre Perdita et Hermione, deux personnages clés de la célèbre tragicomédie de Shakespeare

"LE CONTE D'HIVER". 

L'histoire de Perdita et de Hermione est une histoire d'Abandon.

Soupçonnée d'adultère et accusée de porter l'enfant de son infidélité, Hermione est emprisonnée sur ordre de son mari Léonte, Roi de Sicile.

En prison, Hermione accouche de la petite Perdita. Par disposition de Léonte, Perdita est abandonnée sur un lointain rivage. Elle sera trouvée et élevée par un berger et son fils.

Après une longue série d'évènements, seize ans plus tard, enfin Hermione et Perdita se retrouvent. 

 

La relation Hermione - Perdita devient tant plus intéressante si on tient compte de plusieurs possibilités de lecture: relation mère-fille, relation femme-enfant intérieur où la mère et la fille constituent deux parties de la psyché de la même femme. 

LES NOMS ET LES CHEMINS DE VIE

Shakespeare a toujours été très méticuleux dans le choix des prénoms de ses personnages. 

A son époque, le contexte historique et culturel était influencé par l'alchimie, la magie et la philosophie hermétique, raison pour laquelle les noms étaient souvent choisis pour leur portée magique ou favorable.

Connaître le nom de  quelqu'un signifiait connaître le chemin de vie et les attributs de l'âme d ecette personne.

"Perdita" - en latin - est le participe passé du verbe passif PERDO (perdo, perdis, perdidi, perditum, perdere) qui signifie Perdre, Détruire, Rendre Malheureux mais aussi Rendre faible, Abîmer, Gâcher... 

Le prénom "Hermione" vient du germain "Irmin" qui signifie "très grand", "majestueux. Néanmoins "Hermione" est en lien aussi avec le prénom Hérmes, divinité grecque, messager de l'Olympe, dieu des voyageurs, du commerce et des bergers. 

Ce n'est pas par hasard que Shakespeare fera grandir Perdita dans une communauté de bergers, en enrichissant les liens symboliques entre les deux personnages et leurs prénoms: d'un côté la majesté, la divinité des bergers, la mère, la cour du roi, le monde "civilisé", de l'autre côté la paysanne, la bergère, la fille, la nature bucolique et le monde sauvage. 

Si on considère les deux personnages comme la représentation symbolique de deux facettes d'une même personne, le sauvage séparé de la conscience mène à une existence déséquilibrée. Ou encore, sans la partie sauvage, enfantine, pure et authentique, la royauté ne peut pas exister. 

L'individu intègre est puissant. On a accès à la totalité de son propre pouvoir et au bonheur seulement dans la prise en charge de l'enfant intérieur et de son pouvoir naturel, authentique, libre.   

Dans le conte d'Hiver on assiste donc à la guérison de l'enfant intérieur et au couronnement de la souveraineté de l'être adulte. 

En rentrant à la court de Léonte, son père, Perdita retrouve ses origines royales. Elle retrouve la splendeur de sa matrice, de sa mère "divine" et majestueuse "Hermione".

Dans Le Conte d'Hiver, Hermione meurt de chagrin juste après l'élèvement de Perdita.

Au retour de Perdita, Hermione ressuscite tout comme la splendeur de tous ceux qui retrouvent et ses réunissent à leur enfant Interieur Guéri et Bien Aimé. 

L'ESPACE SANGLANT ENTRE PERDITA ET HERMIONE

 

J'ai peint ce tableau dans l'urgence. Je ressentais la déchirure de l'abandon entre ces deux Êtres. Entre Mère et Fille. Entre Femme et Enfant Intérieur et je voulais le déposer rapidement sur la toile avec les pigments très denses et des contrastes forts pour inpirer le sentiment aigu du désespoir. 

Comme pour toutes les femmes shakespeariennes sacrificielles et sacrifiées que j'ai peintes , l'œil gauche de Hermione est aveuglé, car dépendant de l'hémisphère droit: créatif, émotionnel, féminin.   

Les robes de Perdita et de Hermione sont imbibées de sang coulant de leurs cœurs en "larmes" frappés à mort par la séparation imposée par un masculin (Léonte) fou et en même temps trop rationnel.

Il lui suffit de voir Hermione qui rigole avec Polixenes, une sorte de 1 + 1 = 2, pour se mettre dans tous ses états. Une suspicion obsessionnelle qui se devient soudainement la sûreté de la trahison. 

Pourtant le vrai traître  est Léonte, qui manque d'amour de soi, donc de confiance en soi, dans ses propres perceptions de la réalité. Il manque de flexibilité, d'écoute, de confiance et d'amour vers la Hermione. Léonte est le Masculin sourd qui blesse deux cœurs en un seul coup.  

Une Double Blessure d'identité: pour Hermione en tant que femme et en tant que mère,  pour Perdita, privé de sa vraie place, de son identité, du lien profond et nourricier avec sa mère, il s'agit d'une blessure très complexe qui est pourtant guérie par la Nature Bucolique où elle aura la chance de grandir. 

Dans toutes les blessures d'identité, il y a une blessure sexuelle car ça touche le plaisir d'être soi, le plaisir de créer sa propre vie, de suivre ses vrais désirs: l'élan vitale et l'énergie créatrice ne font que Un.

Une fois que j'ai terminé le tableau, j'ai remarqué que les deux robes sanglantes formaient comme une sorte d'espace commun. J'y ai vu une Vulve Sanglante. Une seule Vulve, comme si Perdita vient de sortir et le sang de sa naissance se mélangeait déjà au sang de la mort. Et aussi une blessure qui condamne  le pur plaisir d'exister.

J'ai pensé au Patriarcat dont Shakespeare a toujours bien mis en exergue la violence et les atrocités. Cette Vulve sanglante donc symbolise la blessure du Patriarcat vers maint de femmes, vers le Féminin en tant que corps/sensations/émotions vraies profondes uniques et imprévisibles, indomptables. 

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